Nouvelles de l'environnement

Quel est l’impact de l’effondrement des matières premières sur les marchés mondiaux sur la sauvegarde des forêts ?

  • Depuis début 2014, le prix de la plupart des matières premières produites dans les tropiques ont dégringolé.
  • La déroute du marché sème le chaos dans le budget national des pays en développement, freinant les investissements, et forçant les producteurs à diminuer leur productivité et à retarder leurs projets d’expansion.
  • Pris séparément, ces développements semblent profiter aux forêts tropicales. Mais la réalité est bien plus complexe.

Depuis début 2014, le prix de la plupart des matières premières produites dans les tropiques ont dégringolé. Le prix de l’huile de palme a chuté de 40 pourcent, celui du bois provenant de Malaisie et du Cameroun a baissé d’environ 20 pourcent, tandis que le prix des graines de soja a baissé d’un tiers et celui du bœuf d’un dixième. La chute du prix des matières premières industrielles comme les métaux, les minéraux, le pétrole et le gaz est encore plus critique dans certains cas. La déroute du marché sème le chaos dans le budget national des pays en développement, freinant les investissements, et forçant les producteurs à diminuer leur productivité et à retarder leurs projets d’expansion.

Pris séparément, ces développements semblent profiter aux forêts tropicales. Après tout, si les investissements diminuent et que le rendement financier est plus faible, il sera moins rentable pour les industries d’exploiter des plantations, une agriculture de production ou encore, l’extraction des ressources sur les terres marginales. Si le prix des terres est plus bas, cela coûterait moins cher d’acquérir, ou de préserver certaines régions.

Mais la réalité est bien plus complexe : selon les experts, le faible prix des matières premières peut à la fois réduire les dépenses du gouvernement en ce qui concerne les programmes de préservation de l’environnement, inciter à changer la façon dont les terres sont exploitées en augmentant notamment l’agriculture vivrière, susciter des pressions politiques pour réduire la sauvegarde des forêts, mais aussi provoquer différentes sortes d’investissements qui peuvent menacer les forêts.

Chevron's Duri oil field in Riau, Sumatra. Photo by Rhett A. Butler
Champ de pétrole Duri, Compagnie Chevron, à Riau, Sumatra. Crédit photo : Rhett A. Butler

Le secteur des produits de base en sursis grâce à son ralentissement

À court terme, la baisse du prix des matières premières pourrait donner un sursis aux forêts en drainant les investissements des sociétés de ressources naturelles et agricoles qui commencent à être touchées par un resserrement du crédit. Les producteurs marginaux sont les plus vulnérables, avec leurs faibles marges bénéficiaires et leurs réserves financières limitées.

Recent price trends for several commodities. Click to enlarge.
Récente évolution du prix de plusieurs matières premières. Cliquez pour agrandir.

« De faibles prix de matières premières vont réduire les pressions exercées sur les forêts par les investissements en commerce agricole, en industries extractives et ceux sur les forêts » a déclaré David Kaimowitz, directeur des ressources naturelles à la Fondation Ford. « C’est ce qu’ils feront directement, en investissant dans ces régions moins rentables et indirectement, en réduisant les redevances et recettes fiscales que les gouvernements utilisent pour investir dans les infrastructures. »

James Deutsch de Vulcan Philanthropies – l’organisation caritative du co-fondateur de Microsoft, Paul Allen – a déjà pu observer des preuves du ralentissement potentiel de la déforestation en Afrique.

« J’ai entendu parler d’au moins deux énormes projets miniers en Centre Afrique qui auraient pu avoir des conséquences importantes sur la biodiversité et qui se retrouvent paralysés ou ralentis à cause de la chute du prix des matières premières, » a déclaré Deutsch à Mongabay. « Dans ce genre de cas, je pense que les conséquences sur la préservation de l’environnement sont extrêmement positives, cela nous permet de gagner du temps afin d’établir de nouvelles politiques et de nouveaux systèmes comme le principe « aucune perte nette » ou la compensation pour les pertes de biodiversité, et ainsi, si ces projets finissent par aboutir, leur impact brut sera moins grave. »

Selon Stephen D’Esposito, Président de ResolveE – un groupe de politiques situé à Washington D.C – le ralentissement donne plus de temps aux défenseurs de l’environnement opérant dans les forêts ou dans les déserts.

« Pendant les périodes où le prix des minéraux est bas, très peu de projets seront développés, et en particulier les projets qui demandent un gros capital. Dans les régions où des projets, comme les exploitations minières, stagnent, on peut envisager de repenser l’exploitation des terres. Ceci pourrait être bénéfique pour les promoteurs, pour la préservation de l’environnement et pour les communautés. Bien trop souvent, des tensions naissent lorsque des projets de développement sont mis en place sans prendre en compte les valeurs divergentes. Nous avons déjà pu voir qu’en étant mieux préparés, les projets ont de meilleurs résultats, comme en Mongolie, ou encore pour certains projets de développement de l’énergie sur les terres fédérales aux Etats-Unis. »

John Reid qui travaille pour le Conservation Strategy Fund – organisation qui utilise des modèles économiques pour soutenir la préservation de l’environnement – est d’accord avec cette idée.

Selon Reid : « La chute du prix des matières premières pourrait avoir un point positif ; elle fait gagner du temps aux organisations pour la préservation de l’environnement, un temps consacré à anticiper les menaces, à renforcer les zones protégées, à faire partager le lien entre la mitigation du réchauffement climatique et les forêts saines, et à promouvoir les subventions vertes, comme celles qui sont en train d’émerger dans de nombreux pays d’Amérique latine pour lutter contre la déforestation. Tout ceci reste périodique, on ne peut donc pas compter sur un faible coût durable… de la préservation de l’environnement, mais il y a ce laps de temps durant lequel certaines menaces peuvent diminuer et durant laquelle, des bénéfices peuvent être faits en fortifiant les bénéfices faits lors de la décennie précédente. »

Une opportunité de créer des réserves

L’une des principales chances à saisir pendant que le prix des matières premières est bas, est de créer des réserves, à la fois en acquérant des territoires et en persuadant les gouvernements de mettre de côté les zones protégées. Deux ONG qui se consacrent aux stratégies relatives aux zones protégées — Rainforest Trust et The Nature Conservancy (TNC) – travaillent déjà sur ces idées.

« La chute du prix des matières premières va nous offrir l’opportunité de protéger des écosystèmes et la vie sauvage dans les tropiques » a déclaré Paul Salaman de Rainforest Trust. « L’effondrement du prix des matières premières peut ébranler la viabilité économique des industries extractives dans la région amazonienne du Brésil par exemple. Au Pérou, l’effondrement du prix du pétrole pourrait avoir influencé la décision du président d’ordonner la création du Parc National de la Sierra del Divisor qui s’étend sur environ 1 300 000 hectares au lieu de pencher du côté des intérêts des industries extractives. »

Mark Tercek, directeur de The Nature Conservancy, a ajouté que les opportunités doivent être envisagées à la fois en acquérant des terres de façon conventionnelle mais aussi en ciblant les actifs dévalorisés des entreprises de matières premières en difficulté.

« Ces derniers mois il y a eu beaucoup de discussions sur la possibilité de s’investir davantage pour servir les intérêts de la sauvegarde de l’environnement, compte tenu du ralentissement du prix des matières premières et des difficultés financières qui en résultent – en particulier dans le secteur minier et dans les secteurs du charbon et de l’énergie. Nous cherchons de nouveaux moyens de nous insérer dans le processus de faillite/restructuration afin d’atteindre notre objectif de préservation de l’environnement, » a confié Tercek à Mongabay.

Rainforest in Sabah, Malaysian Borneo. Photo by Rhett A. Butler.
Forêt tropicale au Sabah, à Bornéo en Malaisie. Crédit photo : Rhett A. Butler.

Les acheteurs prennent le dessus

C’est du côté de la demande du secteur des produits de base que pourraient naître de nouvelles opportunités. Sachant que le prix de certains produits agricoles est le plus bas depuis dix ans, les acheteurs les plus importants ont plus de poids pour forcer les fournisseurs à faire des concessions, y compris sur la façon dont ils produisent ces matières premières.

« Les secteurs acceptent généralement les engagements en matière de développement durable pendant les périodes difficiles », a déclaré Dan Nepstad, directeur général de Earth Innovation Institute. « Le moratoire du soja, par exemple, est né au Brésil au moment où le soja était en train de se rétracter dans le bassin amazonien. »

Le moratoire du soja – mis en place en 2006 suite à la campagne de Greenpeace contre les fast food en Europe qui utilisaient les graines de soja provenant e l’Amazone – est devenu une référence pour détourner la production de matières premières des forêts à haute valeur de conservation. S’en est suivie une adoption massive de la politique de déforestation zéro par les entreprises spécialisées dans le secteur du bétail, de l’huile de palme et des pâtes et papiers. L’adoption de ces engagements s’est accélérée au cours de la récente période de ralentissement.

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Une situation complexe

Alors que la réduction des perspectives financières pour les producteurs de matières premières semble représenter une victoire importante pour les forêts au niveau global, des cycles bas récents ont montré une certaine corrélation entre ce phénomène et le taux de déforestation. Par exemple, pendant la crise financière de 2008-2009, le taux de déforestation dans les tropiques a continué d’augmenter, selon les données de Global Forest Watch.

On peut établir plusieurs explications à cette observation. Tout d’abord, les producteurs de matières premières font des choix en fonction des prix envisagés. De ce fait, tant qu’ils pensent que les prix vont continuer à grimper sur le long terme, une courte période de creux ne va pas dissuader les investisseurs qui ont les capitaux suffisants. En fait, ces gros investisseurs peuvent y voir une opportunité de renforcer leur part du marché en rachetant leurs concurrents et opérateurs marginaux.

Kaimowitz, de la Fondation Ford explique : « Tout cela dépend davantage des prédictions sur l’avenir que des prix actuels. Nombre d’entre eux représentent des investissements à long terme. Donc la solution n’est pas de se baser sur les prix actuels, mais sur les prix estimés par les entreprises dans 10 ou 20 ans. Ce n’est pas pour rien si les entreprises sont relativement haussières concernant le prix des matières premières sur le long terme plutôt que sur le prix à court terme. »

« Je ne pense pas que le prix des matières premières restera bas sur le long terme, » ajoute Daniel Katz, de la Overbrook Foundation, en prenant en compte les tendances séculaires à long terme comme la croissance de la population et l’augmentation des habitudes de consommation, alors que le reste du monde se rapproche du niveau de richesse en Occident. « Les marchés vont continuer à demander des prix élevés pour beaucoup de matières premières, et les fluctuations de prix vont continuer. »

Les plus grosses entreprises agroalimentaires sont souvent très diversifiées. Donc même si le prix de certaines matières premières a diminué de moitié, la baisse du prix d’autres matières premières peut être moindre et certaines, comme le cacao, montrent même une tendance inverse.

Qui plus est, les tendances globales ne représentent pas forcément les tendances locales. Les fluctuations de la monnaie, l’accès aux marchés et les rendements financiers relatifs à d’autres investissements peuvent aller à l’encontre des tendances plus larges.

Selon Nepstad : « Ce n’est pas une tendance générale. La production du bœuf a augmenté par exemple, sachant que le refus des importations américaines et européennes par la Russie en représailles de sanctions économiques profite à certains pays qui en assurent la production. Le prix du soja varie très rapidement, en fonction des mauvaises récoltes, comme la sécheresse qu’ont connue les Etats-Unis il y a quelques années. »

« Nous devons comprendre la globalité des téléconnexions économiques, comme l’impact de la vache folle sur la réglementation des rations animales en Europe, qui a conduit à une hausse des demandes en protéine de soja alors même que le real brésilien était dévalué. »

Et même lorsque le prix des matières premières chute brusquement, il peut toujours réussir à dépasser d’autres options de placement. Les producteurs d’huile de palme les plus prolifiques en Indonésie, par exemple, font toujours des bénéfices énormes, de 250 à 300 dollars par tonne, et ce, malgré le fait que le prix international tourne autour des 550 dollars par tonne.

D’après Erik Meijaard, écologiste au sein du projet Borneo Futures : « Je dirais que les prix ne vont pas énormément ralentir le développement de la production de l’huile palme en Indonésie. Peut-être que c’est dû au fait que cette croissance est stimulée davantage par l’idée de profits potentiels plutôt que par de vraies analyses. »

Meijaard a fait remarquer que les plantations d’huile de palme se sont rapidement développées entre 2010 et 2013, et ce, même si le prix de l’huile de palme était divisé par deux à ce moment-là et qu’un moratoire national sur la transformation des forêts et des tourbières était en place. La production d’huile de palme offre toujours de meilleurs rendements que ses principales alternatives : le caoutchouc et le bois.

Selon Meijaard : « Il pourrait y avoir de graves conséquences sur la déforestation car les concessions forestières sont encore moins rentables par exemple, cela pourrait aussi inciter le gouvernement à accélérer le processus de dégagement des forêts nationales pour les transformer et développer les plantations. »

Illegal forest clearing for oil palm in Riau, Sumatra. Photo by Rhett A. Butler
Déboisement illégal pour la production d’huile de palme à Riau, Sumatra. Crédit photo : Rhett A. Butler

Des prix faibles: une épée à double tranchant

Des conditions économiques désastreuses peuvent pousser les producteurs en difficulté à trouver des solutions drastiques. Autrement dit, prendre des libertés, voire s’éloigner des engagements pris pour la préservation des forêts et d’autres engagements environnementaux. Les entreprises ruinées pourraient voir leurs actifs liquidés.

Selon Tercek du TNC : « La crise financière qui touche les producteurs de matières premières pourrait permettre de restaurer les passifs abandonnés lorsque les entreprises font faillite. L’un des risques du processus de restructuration en cas de faillite est que certaines sociétés pourraient tenter de se détacher ou de s’écarter de leurs engagements de réhabilitation et de nettoyage écologique, et en particulier dans certains Etats, qui ‘s’auto-garantissent’ contre ces passifs (Wyoming, West Virginia par exemple). »

« Cela devient un sujet de préoccupation quand les entreprises font faillite, qu’elles sont incapables de se restructurer et qu’elles finissent par être mises en liquidation. Dans le pire des cas, tout le monde s’écarte de ses engagements, y compris en ce qui concerne la réhabilitation. Ceci pourrait se produire dans le secteur de l’exploitation du charbon comme dans bien d’autres. »

Selon D’Esposito, certaines entreprises sont soumises à de fortes pressions pour réduire leurs frais, ce qui les pousse à agir contre la préservation de l’environnement.

« Même si les entreprises dominantes ne vont probablement pas revenir sur leurs engagements pris sur le plan politique, elles pourraient bien réduire les fonds qui soutiennent les programmes de préservation de l’environnement et de protection de la biodiversité à l’échelle locale. Les restrictions budgétaires ne représentent qu’un seul problème. Il pourrait y avoir davantage de pertes dues aux contraintes appliquées à la direction et à l’innovation. Dans un tel climat, il est très difficile pour les directeurs d’entreprises de promouvoir de nouveaux projets ou de prendre de nouveaux engagements.

« Dans de telles circonstances, il incombe aux leaders pour la sauvegarde de l’environnement d’imaginer des solutions qui bénéficieraient à tous en matière de préservation de l‘environnement et d’opportunités de développement. »

Logging in Borneo. Photo by Rhett A. Butler
Abattage d’arbres à Bornéo. Crédit photo : Rhett A. Butler

Les gouvernements dans le doute

Il n’y a pas que les entreprises qui ressentent une certaine pression suite à l’effondrement du prix des matières premières, le trésor public a aussi pris un coup.

Dans certains pays où les ressources naturelles et le secteur agroalimentaire occupent une place importante, des tendances faibles peuvent augmenter les pressions politiques pour réduire la règlementation environnementale.

D’après John Reid, de Conservation Strategy Fund, sachant que la production de matières premières a joué un rôle capital dans le développement économique de l’Amérique latine ces dernières années, les législateurs pourraient être enclin à demander la diminution des lois environnementales.

« Le ralentissement économique qui frappe les économies basées sur les matières premières en Amérique latine met gravement en danger la nature, » a-t-il déclaré. « D’une part, la réglementation environnementale est tenue responsable de l’effondrement économique, même si son rôle dans ce déclin est totalement insignifiant comparé aux conséquences de la diminution des demandes de la Chine en ce qui concerne les matières premières. En conséquence, tout est fait pour qu’on renonce aux exigences d’évaluation de l’impact environnemental. C’est ce qui s’est passé au Pérou avec le « paquetazo » de 2014 qui a limité l’autorité du Ministère de l’environnement. »

« Au Brésil, cette tendance est très nette dans la proposition actuelle de dispenser les projets prioritaires des accréditations environnementales de base. La réglementation environnementale perçue comme un frein au développement est un bobard anti-conservation, mais c’est une histoire racontée dans le monde entier pour enrayer les progrès faits pour la protection de la nature. »

Et en Indonésie, les prix bas ont incité les lobbyistes de l’industrie à faire pression pour mettre en place des mesures qui devraient booster la demande en huile de palme à grande échelle.

« La chute du prix de l’huile de palme brute a incité certains producteurs indonésiens à faire pression pour obtenir un mandat sur le biodiésel pour soutenir les prix, » explique Chris Elliot, de l’Alliance pour le climat et l’utilisation des sols, un regroupement de fondations philanthropiques. Une fois que les prix se rétabliront, ce genre de mandat « pourrait aggraver la déforestation. »

Tercek du TNC partage cet avis.

« Il faut noter que le prix des matières premières est cyclique, » a-t-il déclaré à Mongabay. « La menace de transformation de l’habitat refait surface dès que le prix des matières premières remonte la pente, s’il n’y a pas de nouvelle réglementation. Nous ne devons pas perdre de vue l’objectif quand on sait qu’on doit faire face à des menaces sur le long terme. »

Il se pourrait bien qu’il n’y ait pas que la nature qui soit perdante face au lobbying. Selon Kaimowitz, il se pourrait que les progrès faits sur la protection des droits des populations indigènes et des communautés locales soient aussi atténués.

« De faibles prix dans les secteurs agricoles, minéraux et de l’énergie devraient réduire la pression qui pèse sur les forêts et devraient rendre les gouvernements plus enclin à assurer les droits territoriaux des communautés indigènes et des collectivités forestières, mais ils peuvent aussi avoir un impact négatif si les gouvernements réduisent la protection de l’environnement et sa réglementation pour tenter d’attirer les investisseurs. »

Il est également possible que les gouvernements répondent aux difficultés économiques qu’ils traversent en augmentant les investissements dans les infrastructures, comme l’ont fait les Etats-Unis pendant la Grande Dépression.

« L’effondrement de l’économie pourrait paradoxalement augmenter les menaces sur des projets importants d’infrastructure,» a déclaré Reid. « C’est à cause de toutes ces liquidités qui existent encore en Asie, des faibles rendements dans les marchés financiers et des capacités de construction à l’arrêt. La Chine pourrait entreprendre une sorte de Works Progress Administration (WPA) générale, en payant ces propres sociétés pour construire des projets d’infrastructure dans les pays en développement avec un crédit bon marché pour les aider à garder le cap jusqu’à ce que les demandes intérieures reprennent. »

En effet, depuis que les marchés ont commencé à ralentir l’économie de la Chine en 2011, le gouvernement chinois et les entreprises ont annoncé la mise en place de projets pour bâtir un canal transocéanique à travers le Nicaragua, une voie ferrée qui traverserait toute l’Amérique du Sud, ainsi qu’un certain nombre de gros projets de construction de routes en Afrique et en Asie du sud-est.

A wood fiber plantation for paper production in Sumatra, Indonesia. Photo by Rhett A. Butler
Plantation de fibres de bois pour la production du papier au Sumatra, Indonésie. Crédit photo : Rhett A. Butler

Des programmes de préservation de l’environnement amputés

Au-delà du risque de réduire la réglementation environnementale et d’amadouer les producteurs, les gouvernements pourraient bien se retirer des programmes de conservation de l’environnement lors des périodes économiques difficiles. On a déjà pu observer ce phénomène dans des régions allant de l’Amazonie à la Zambie.

D’après Reid : « On peut observer un impact très net au Mexique, là où le Conservation Strategic Fund fonctionne. Là-bas, les revenus du gouvernement dépendent du pétrole, donc il y a moins d’argent qui circule, et les principales fonctions gouvernementales, comme le service de gestion des parcs nationaux, ont gravement été touchées. Il y a eu de très importantes coupes générales au sein de la Commission nationale des aires naturelles protégées (Conanp), le service des parcs au Mexique. »

Deutsch, lui, parle de l’Afrique du Sud.

« Il y a des pays comme la Zambie, qui dépend énormément des exportations de cuivre, où l’effondrement du prix des matières premières a eu un impact considérable sur l’économie du pays, et a mis une pression supplémentaire sur les projets de préservation de l’environnement ; soit en rendant les locaux désespérés de trouver de nouvelles opportunités économiques, soit en ayant des conséquences sur l’économie de la préservation de l’environnement (autrement dit le résultat de la dévaluation de la monnaie). »

Une période difficile implique également une réduction du budget des forces de l’ordre, selon Adrian Forsyth de Andes Amazon Fund.

De plus, de faibles prix peuvent aussi inciter les entreprises à supprimer les projets de recherche.

« En ce qui concerne les impacts négatifs, je me suis récemment engagée dans plusieurs projets de recherche intégrés dans la zone arctique de l’Alaska, » a déclaré Carly Vynne, écologiste indépendante. « Le fait que les principales entreprises d’exploitation du pétrole et du gaz se soient retirées, mais aussi les opérations de réduction, ont des répercussions négatives sur les projets de recherche en cours, la plupart d’entre eux étant subventionnés par ces entreprises. La disparition de tels projets de recherche va probablement avoir des conséquences sur les communautés locales (perte d’emplois et de suivi des programmes) mais aussi à long terme, sur les gros projets de recherche (un programme de recherche intégré en Arctique qui recevait encore l’année dernière 1 million de dollars de subvention de la compagnie Shell ne recevra certainement plus le même montant, sachant que la compagnie a décidé de ne pas poursuivre le forage en mer). »

Rainforest in Borneo. Photo by Rhett A. Butler
Forêt équatoriale, Bornéo. Crédit photo : Rhett A. Butler

Une perspective dans le flou

En prenant en considération tous les facteurs en jeu, les conséquences de la baisse du prix des matières premières sont loin d’être certaines. Les précédents cycles bas fournissent des preuves divergentes. De manière générale, de faibles prix mènent à une baisse des investissements, qui se traduisent par une diminution des valeurs foncières. Et vice versa.

Cependant, ce lien de cause à effet ne s’applique pas partout ni pour toutes les matières premières. Par exemple, certains pays qui tirent une grande partie de leur richesse du pétrole font parfois l’expérience inverse, selon Sven Wunder, chercheur au Centre de recherche forestière internationale (CIFOR).

Dans certains pays comme le Gabon, le Venezuela ou encore le Cameroun, si le prix du pétrole est élevé, cela conduit en général les habitants à abandonner l’agriculture pour déménager dans les villes, ce qui se traduit par de faibles taux de pertes forestières dans le pays (les conséquences à l’échelle internationale sont incertaines puisque plus de nourriture est importée). Quand l’économie du Cameroun a chuté, au milieu des années 80 lorsque le prix des matières premières était bas, les habitants ont quitté le secteur des services et sont retournés dans les campagnes. Le taux de déforestation a alors augmenté.

Mais ce lien de cause à effet n’est pas intouchable ; l’Équateur en est le parfait contre-exemple. À l’inverse de ses pairs, l’Équateur a réinvesti ces revenus pétroliers dans des projets de construction de route, ce qui a permis d’ouvrir à la colonisation des zones forestières reculées – et à plus d’extraction pétrolière – causant également une augmentation du taux de déforestation.

Malgré tout, Wunder a le sentiment que le ralentissement économique actuel « aura probablement un effet net positif sur la préservation de l’environnement ».

« La plupart des menaces pour la biodiversité sont liées à la perte des habitats, qui est dominé par le développement de l’agriculture, » a-t-il déclaré à Mongabay. « Quand le prix des matières premières chute, ces pressions diminuent. Je pense que c’est ça, l’effet dominant. »

Gold mining in the Peruvian Amazon. Photo by Rhett A. Butler.
Exploitation aurifère dans l’Amazonie péruvienne. Crédit photo : Rhett A. Butler.

Interview complètes

Mark Tercek – TNC

Avez-vous déjà eu l’occasion d’assister à une discussion dans les cercles pour la préservation de l’environnement à propos de l’impact de l’effondrement récent du prix des matières premières sur les efforts mis en place pour protéger les écosystèmes et la vie sauvage?

Oui, ces derniers mois il y a eu beaucoup de discussions sur la possibilité de s’investir davantage pour servir les intérêts de la sauvegarde de l’environnement, compte tenu du ralentissement du prix des matières premières et des difficultés financières qui en résultent – en particulier dans le secteur minier et dans les secteurs du charbon et de l’énergie. Nous cherchons de nouveaux moyens de nous insérer dans le processus de faillite/restructuration afin d’atteindre notre objectif de préservation de l’environnement.

Est-ce que l’effondrement du prix des matières premières pourrait avoir un effet positif sur la préservation de l’environnement ?

Oui. Le fait que la valeur des actifs soit plus faible rend les propositions d’investissement plus intéressantes. Sachant que la production des matières premières est ralentie, les dépenses du capital de croissance seront moindres en ce qui concerne les nouveaux projets de développement. La crise financière qui touche les producteurs de matières premières pourrait permettre de restaurer les passifs abandonnés lorsque les entreprises font faillite. L’un des risques du processus de restructuration en cas de faillite est que certaines sociétés pourraient tenter de se détacher ou de s’écarter de leurs engagements de réhabilitation et de nettoyage écologique, et en particulier dans certains Etats, qui ‘s’auto-garantissent’ contre ces passifs (Wyoming, West Virginia par exemple).

Cela dit, il faut noter que le prix des matières premières est cyclique. La menace de transformation de l’habitat refait surface dès que le prix des matières premières remonte la pente, s’il n’y a pas de nouvelle réglementation. Nous ne devons pas perdre de vue l’objectif quand on sait qu’on doit faire face à des menaces sur le long terme

Est-ce qu’il pourrait aussi nuire à la préservation de l’environnement ?

Oui et non. Cela devient un sujet de préoccupation quand les entreprises font faillite, qu’elles sont incapables de se restructurer et qu’elles finissent par être mises en liquidation. Dans le pire des cas, tout le monde s’écarte de ses engagements, y compris en ce qui concerne la réhabilitation. Ceci pourrait se produire dans le secteur de l’exploitation du charbon comme dans bien d’autres. Il y a évidemment des restrictions budgétaires à cause du ralentissement du prix des matières premières, mais aucune entreprise n’a pris de mesures catastrophiques pour l’environnement dans le seul but de générer des fonds. Les coupes à blanc des forêts ne posent problème que si une compagnie minière décide de créer une nouvelle mine (en creusant le sommet des montagnes par exemple), mais ce n’est pas une menace pour l’instant, compte tenu du prix historiquement bas à la fois du charbon thermique (électricité) et du charbon métallurgique (acier). La superficie de terrain et le terrain minier appartiennent généralement à des groupes différents (le premier appartient en général aux Sociétés d’investissement immobilier cotées ou aux TIMO).

Globalement, le charbon est responsable de la majorité des émissions de gaz à effet de serre. Bien souvent, on trouve du charbon en-dessous des forêts qui sont détruites lors des forages, et la déforestation représente 16% des émissions de gaz à effet de serre. S’introduire dans ce marché pour supprimer les risques d’exploitation et de combustion du charbon, mais aussi de déforestation, portés sur le forage des sommets de montagne, pourrait représenter une opportunité énorme pour protéger à la fois le climat et les terres. L’unité d’impact investing du TNC, NatureVest, explore activement les opportunités d’entrer en transaction avec ces sociétés pour acheter des actifs stratégiques (miniers et de terrain) afin de protéger de façon permanente des endroits comme la région centrale des Appalaches. Il reste encore à voir si la crise financière actuelle est assez sérieuse pour forcer ces sociétés à vendre des actifs ou s’ils se contenteront de se mettre à l’abri (restructuration par le Chap. 11) et de redémarrer les mines lors du prochain cycle de production de matières premières. Alors que la part du charbon dans la production électrique aux Etats-Unis n’a aussi jamais été aussi basse, plusieurs analystes pensent qu’elle ne tombera pas en-dessous de la barre des 30% au cours des prochaines décennies. Certains analystes (JPMC) pensent que le charbon thermique dans les Appalaches est épuisé et que seul le charbon métallurgique reste viable dans cette région.

Le fait que le prix du gaz naturel soit incroyablement faible a été un facteur déterminant dans le ralentissement de la production du charbon, beaucoup de centrales sont en train de passer au gaz naturel (même au cœur de l’exploitation du charbon dans les Appalaches) car l’économie fonctionne bien. Les gaz naturels émettent environ la moitié des émissions de gaz à effet de serre que produisent les exploitations de charbon. Le fait que le prix du charbon, du gaz naturel et du pétrole soit faible semble également avoir réduit les incitations financières pour les énergies renouvelables car les énergies solaire et éolienne doivent se mesurer à des combustibles fossiles à coûts réduits. De ce fait, très peu de projets liés aux énergies renouvelables pourront être lancés dans cet environnement où le prix des matières premières est faible.

Stephen D’Esposito – RESOLVE

Avez-vous déjà eu l’occasion d’assister à une discussion dans les cercles pour la préservation de l’environnement sur l’impact de l’effondrement récent du prix des matières premières sur les efforts mis en place pour protéger les écosystèmes et la vie sauvage?

Il en a été question lors de l’agenda international de réunion du forum économique mondial sur l’avenir de l’exploitation minière et métallurgique, que je préside http://www.weforum.org/content/global-agenda-council-future-mining-metals-2014-2016-0. Le Conseil comprend différents leaders des milieux pour la préservation de l’environnement, pour le développement, pour les droits de l’homme et pour les milieux d’affaires. Nous travaillons aussi en collaboration avec d’autres Conseils, y compris ceux qui sont spécialisés dans des domaines comme la biodiversité. Nous avons soulevé la question du problème du prix des matières premières, et en particulier maintenant que nous nous apprêtons à lancer une nouvelle campagne sur les bienfaits de l’aménagement du paysage pour les projets de développement à grande échelle. C’est une question qui préoccupe tous ceux qui travaillent sur le développement et la préservation de l’environnement en Colombie-Britannique, en Alaska, et dans d’autres régions.

RESOLVE, le Forum économique mondial, l’Autorité internationale des fonds marins, pour ne citer qu’eux, ont récemment organisé un dialogue entre les parties prenantes sur la question de la transparence, de la préservation de l’environnement et sur la question fiscale en ce qui concerne l’exploitation minière des fonds marins. La plupart des parties est d’avis que si le prix des minéraux est faible, cela nous donnera plus de temps pour travailler sur quelques problèmes liés à l’exploitation minière des fonds marins, comme la question de la biodiversité.

Est-ce que l’effondrement du prix des matières premières pourrait avoir un effet positif sur la préservation de l’environnement ?

Pendant les périodes où le prix des minéraux est bas, très peu de projets seront développés, et en particulier les projets qui demandent un gros capital. Dans les régions où des projets, comme les exploitations minières, stagnent, on peut envisager de repenser l’exploitation des terres. Ceci pourrait être bénéfique pour les promoteurs, pour la préservation de l’environnement et pour les communautés. Bien trop souvent, des tensions naissent lorsque des projets de développement sont mis en place sans prendre en compte les valeurs divergentes. Nous avons déjà pu voir qu’en étant mieux préparés, les projets ont de meilleurs résultats, comme en Mongolie ou encore pour certains projets de développement de l’énergie sur les terres fédérales aux Etats-Unis.

La durée du ralentissement sera un facteur déterminant. Par exemple, le financement de projets par les entreprises de développement pour les efforts de conservation environnants peut être maintenu si les prix ne restent bas que pendant une courte période. Il peut s’avérer plus difficile de tenir ces engagements si le ralentissement perdure.

Il est très probable que des pressions économiques très fortes puissent stimuler l’innovation des promoteurs, et notamment en ce qui concerne des projets qui utilisent une technologie et des techniques nouvelles pour diminuer l’empreinte du développement (et peut-être les dépenses en capital initiales) ; pour utiliser moins d’eau et pour réduire grandement l’impact écologique. De plus, de nouvelles stratégies de développement empêchent qu’il y ait un impact dans les régions où la biodiversité est importante.

N’importe quel opportuniste de la préservation de l’environnement devrait comprendre le fonctionnement cyclique des affaires et évaluer ses stratégies en fonction de ces cycles, et notamment exploiter les opportunités de travailler en partenariat avec les promoteurs en charge.

Est-ce qu’il pourrait aussi nuire à la préservation de l’environnement ?

Pour préserver l’environnement, il faut de bons partenaires de développement. Il faut prendre conscience que les pressions financières auront un impact sur la capacité des promoteurs en charge à participer aux programmes à valeur ajoutée spécialisés dans la préservation de l’environnement et dans la biodiversité. Je sais bien qu’il y a énormément de pression au sein des entreprises pour réduire les coûts. Même si les entreprises dominantes ne vont probablement pas revenir sur leurs engagements pris sur le plan politique, elles pourraient bien réduire les fonds qui soutiennent les programmes de préservation de l’environnement et de protection de la biodiversité à l’échelle locale.

Les restrictions budgétaires ne représentent qu’un seul problème. Il pourrait y avoir davantage de pertes dues aux contraintes appliquées à la direction et à l’innovation. Dans un tel climat, il est très difficile pour les directeurs d’entreprises de promouvoir de nouveaux projets ou de prendre de nouveaux engagements. Nombre d’entre eux tourneront la tête pour ne pas voir leurs collègues perdre leur emploi. Dans de telles circonstances, il incombe aux leaders pour la sauvegarde de l’environnement d’imaginer des solutions qui bénéficieraient à tous en matière de préservation de l‘environnement et d’opportunités de développement.

Il faut différencier les projets officiels de ceux qui ne le sont pas, et en particulier ceux où les matières premières sont garanties et marchandées illégalement. Le nombre d’opérations de ce genre peut augmenter lors de périodes difficiles, puisque les coûts initiaux peuvent être considérablement réduits, comme par exemple à petite échelle, l’exploitation minière illégale de l’or. Dans certaines régions, comme l’Amazonie, c’est ce genre d’exploitation minière qui représente la plus grande menace pour la biodiversité. Le fait que l’exploitation aurifère à petite échelle augmente dangereusement, associé avec la baisse du développement minier à grande échelle représenterait un énorme problème pour la protection de la biodiversité dans des régions importantes.

John Reid – Conservation Strategy Fund

Avez-vous déjà eu l’occasion d’assister à une discussion dans les cercles pour la préservation de l’environnement sur l’impact de l’effondrement récent du prix des matières premières sur les efforts mis en place pour protéger les écosystèmes et la vie sauvage?

On peut observer un impact très net au Mexique, là où le Conservation Strategic Fund fonctionne. Là-bas, les revenus du gouvernement dépendent du pétrole, donc il y a moins d’argent qui circule, et les principales fonctions gouvernementales, comme le service de gestion des parcs nationaux, ont gravement été touchées. Il y a eu de très importantes coupes générales au sein de la Commission nationale des aires naturelles protégées (Conanp), le service des parcs au Mexique.

Est-ce que l’effondrement du prix des matières premières pourrait avoir un effet positif sur la préservation de l’environnement ?
La chute du prix des matières premières pourrait avoir un point positif ; elle fait gagner du temps aux organisations pour la préservation de l’environnement, un temps consacré à anticiper les menaces, à renforcer les zones protégées, à faire partager le lien entre la mitigation du réchauffement climatique et les forêts saines, et à promouvoir les subventions vertes, comme celles qui sont en train d’émerger dans de nombreux pays d’Amérique latine pour lutter contre la déforestation. Tout ceci reste périodique, on ne peut donc pas compter sur un faible coût durable… de la préservation de l’environnement, mais il y a ce laps de temps durant lequel certaines menaces peuvent diminuer et durant laquelle, des bénéfices peuvent être faits en fortifiant les bénéfices faits lors de la décennie précédente.

Est-ce qu’il pourrait aussi nuire à la préservation de l’environnement ?

Le ralentissement économique qui frappe les économies basées sur les matières premières en Amérique latine met gravement en danger la nature. D’une part, la réglementation environnementale est tenue responsable de l’effondrement économique, même si son rôle dans ce déclin est totalement insignifiant comparé aux conséquences de la diminution des demandes de la Chine en ce qui concerne les matières premières. En conséquence, tout est fait pour qu’on renonce aux exigences d’évaluation de l’impact environnemental. C’est ce qui s’est passé au Pérou avec le « paquetazo » de 2014 qui a limité l’autorité du Ministère de l’environnement. Au Brésil, cette tendance est très nette dans la proposition actuelle de dispenser les projets prioritaires des accréditations environnementales de base. La réglementation environnementale perçue comme un frein au développement est un bobard anti-conservation, mais c’est une histoire racontée dans le monde entier pour enrayer les progrès faits pour la protection de la nature. D’autre part, l’effondrement du prix des minéraux risque de causer quelques faillites ainsi que l’abandon des mines les plus importantes, laissant un sérieux besoin de nettoyage. De plus, l’effondrement de l’économie pourrait paradoxalement augmenter les menaces sur des projets importants d’infrastructure. C’est à cause de toutes ces liquidités qui existent encore en Asie, des faibles rendements dans les marchés financiers et des capacités de construction à l’arrêt. La Chine pourrait entreprendre une sorte de Works Progress Administration (WPA) générale, en payant ces propres sociétés pour construire des projets d’infrastructure dans les pays en développement avec un crédit bon marché pour les aider à garder le cap jusqu’à ce que les demandes intérieures reprennent.

Enfin, une période économique favorable crée une sorte d’optimisme qui aide les sociétés à prendre des mesures largement soutenues pour protéger leur patrimoine naturel.

Carly Vynne – Osprey Insights LLC

Avez-vous déjà eu l’occasion d’assister à une discussion dans les cercles pour la préservation de l’environnement sur l’impact de l’effondrement récent du prix des matières premières sur les efforts mis en place pour protéger les écosystèmes et la vie sauvage?

J’ai récemment participé à une formation pour les experts en biodiversité, organisée par les personnes qui s’occupent des prêts de la Banque mondiale et qui déterminent les normes de performance dans le domaine de la biodiversité contre les projets de développement proposés. Ils ont observé un ralentissement dans le nombre de propositions/projets dans le domaine des industries extractives (même s’il faut noter une légère hausse dans le nombre de propositions de projets/barrages hydroélectriques), donc c’est quelque chose qu’on a remarqué et dont on parle et il semblerait que cela permettrait aux projets de préservation de l’environnement d’être compétitifs.

Est-ce que l’effondrement du prix des matières premières pourrait nuire à la préservation de l’environnement ?

En ce qui concerne les impacts négatifs, je me suis récemment engagée dans plusieurs projets de recherche intégrés dans la zone arctique de l’Alaska. Le fait que les principales entreprises d’exploitation du pétrole et du gaz se soient retirées, mais aussi les opérations de réduction, ont des répercussions négatives sur les projets de recherche en cours, la plupart d’entre eux étant subventionnés par ces entreprises. La disparition de tels projets de recherche va probablement avoir des conséquences sur les communautés locales (perte d’emplois et de suivi des programmes) mais aussi à long terme, sur les gros projets de recherche (un programme de recherche intégré en Arctique qui recevait encore l’année dernière 1 million de dollars de subvention de la compagnie Shell ne recevra certainement plus le même montant, sachant que la compagnie a décidé de ne pas poursuivre le forage en mer).

Mongabay.org est bénéficiaire de l’Alliance pour le climat et l’utilisation des sols (CLUA), la Fondation Ford et la Fondation Overbrook.

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