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Près de 90 pour cent des forêts des basses-terres de la République du Congo ouvertes à l’exploitation

Bien que la République du Congo ait ouvert près de 90 pour cent de ses forêts des basses-terres à l’exploitation, la majorité des coupes de bois effectuées dans le pays est toujours illégale, d’après un nouveau rapport de l’institut Chatham House. En fait, l’institut politique britannique constate que les coupes de bois illégales en République du Congo pourraient représenter de 70 à 75% de l’industrie forestière.



« Il y a deux types principaux de coupes illégales dans le pays : des coupes «informelles», artisanales et à petite échelle pour les marchés locaux (estimées à 20% du total des coupes) ; et des coupes en violation des diverses réglementations par de grands concessionnaires détenteurs de licences,» explique le rapport. En effet, en 2011 l’Observateur Indépendant de l’Application de la Loi Forestière et de la Gouvernance (OI-FLEG) a mis à jour des infractions à la réglementation dans toutes les concessions forestières visitées.



La République du Congo est l’un des pays les plus boisés du continent : une forêt dense couvre 21,3 millions d’hectares, soit 65% de la surface du pays. Et pourtant la déforestation est un problème constant et qui va en s’aggravant. D’après l’institut Global Forest Watch, la République du Congo a perdu quasiment 300.000 hectares de couverture forestière entre 2000 et 2013. Les taux de déforestation et de dégradation forestière ont fait un bond en avant ces dernières années, ainsi la dégradation forestière a doublé entre les années 90 et les années 2000. Ceci est en partie dû au fait que très peu de forêts sont protégées en République du Congo.




Gorille des Basses terres occidentales (Gorilla gorilla gorilla) en captivité. Cette sous-espèce est celle vivant en République du Congo. Photo Rhett A. Butler.

Gorille des Basses terres occidentales (Gorilla gorilla gorilla) en captivité. Cette sous-espèce est celle vivant en République du Congo. Photo Rhett A. Butler.

« Près de 90 pour cent des forêts denses humides des basses-terres du Congo sont maintenant ouvertes à l’exploitation, et l’exploitation est déjà en cours dans les deux tiers de ces zones, » indique le rapport. « C’est une proportion beaucoup plus élevée que dans d’autres pays du Bassin du Congo. La plupart des forêts dans le sud du Congo ont déjà été exploitées et subissent maintenant une deuxième ou troisième série de coupes. »


Selon l’institut Chatham House, dix sociétés sont responsables de 90% de l’exploitation forestière industrielle dans le pays. Les sociétés forestières visent principalement l’okoumé (Aucoumea klaineana) et le sapelli (Entandrophragma cylindricum), bien que tous deux soient classés parmi les essences menacées sur la Liste Rouge de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature).



Dans le même temps, les palmiers à huile représentent une menace grandissante pour les forêts du pays, car cela signifie que les forêts ne sont pas exploitées de manière sélective pour des essences ciblées, mais soumises à des coupes claires pour faire place à la monoculture.



« L’huile de palme a une part de plus en plus importante en République du Congo et dans d’autres pays du Bassin du Congo. Le projet de la plus grande plantation de palmiers à huile dans le Bassin de Congo a lieu en République du Congo,» a déclaré à mongabay.com Sam Lawson, l’auteur du rapport pour Chatham House. « La société concernée est en train d’abattre une vaste forêt vierge peuplée par des gorilles et des éléphants de forêt. On a constaté qu’elle opérait de manière illégale. On estime que ce seul projet pourrait doubler le taux de déforestation dans le pays.»



La plantation de palmiers à huile est dirigée par la société malaisienne, Atama Plantation Limited, et devrait couvrir 180.000 hectares. Sur son site internet, la société déclare « attacher une grande importance à la préservation des ressources naturelles et de la biodiversité du pays, tout en améliorant les sources de revenus et, à terme, la vie du peuple congolais. »



Mais l’institut Chatham House fait remarquer que toutes les exportations de bois en provenance de République du Congo devraient être considérées à « haut risque », à moins d’avoir été certifiées de manière indépendante. Etant donné le niveau d’exploitation présumée illégale, le rapport constate qu’une grande partie du secteur se détourne des marchés sensibles qui ont adopté récemment des lois contre l’importation de bois d’origine illégale, tels que l’Union européenne, Les Etats Unis, et l’Australie. Actuellement, environ 60 pour cent de la production de bois du pays part en Chine, qui est le plus gros importateur de bois d’origine illégale.





Un point positif pour l’industrie du pays est son Accord de Partenariat Volontaire (APV) avec l’Union Européenne sur l’Application des réglementations forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux (FLEGT), qui assure que seul le bois coupé légalement peut entrer dans les états membres. Le rapport recommande la poursuite du partenariat établi dans le cadre du FLEGT, mais aussi que l’U.E. et la République du Congo reconnaissent tous deux « qu’un long chemin reste à parcourir, et qu’il ne faut pas indûment relâcher les standards et les procédures afin d’accélérer le processus. »



En outre, le rapport recommande que le gouvernement applique de façon plus stricte – et augmente – les sanctions à l’égard des trafiquants de bois ainsi qu’un redoublement des taxes sur les sociétés d’exploitation forestière.



« Il est essentiel que le gouvernement intensifie ses efforts pour collecter les taxes forestières », dit le rapport. « Les recettes plus importantes résultant d’une meilleure collecte des taxes devraient être utilisées pour augmenter les moyens humains et techniques dédiés à la surveillance et à l’application des réglementations forestières. »



Lawson dit que l’exploitation forestière illégale à travers le monde – d’une valeur estimée entre 30 et 100 milliards de dollars de gains frauduleux – vole directement leurs ressources aux communautés locales.



« Dans ces pays, des millions de gens dépendent de la forêt pour leurs moyens de subsistance : nourriture, combustible, matériaux de construction, remèdes, eau. Quand les forêts sont détruites ou dégradées par une exploitation illégale, les moyens de subsistance sont endommagés ou détruits. L’exploitation forestière illégale alimente également la corruption et les conflits, empêchant le pays dans son ensemble de se développer. En conséquence, les pauvres restent pauvres.»




Eléphants de forêt dans le fleuve Mbeli, Parc National Nouabalé-Ndoki en République du Congo. Photo Thomas Breuer.
Eléphants de forêt dans le fleuve Mbeli, Parc National Nouabalé-Ndoki en République du Congo. Photo Thomas Breuer/Creative Commons 2.5.


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