Le fleuve Congo traverse le continent africain, terminant sa course en République démocratique du Congo (RDC) où il se jette à environ 42 500 mètres cubes par seconde dans l’océan Atlantique. À l’heure actuelle, on prévoit d’exploiter la force phénoménale de l’eau et de construire ce qui promet d’être l’installation hydroélectrique la plus grande du monde : le barrage Grand Inga.
Celui-ci pourrait produire jusqu’à 40 000 mégawatts (MW) d’électricité, soit plus de deux fois l’énergie actuellement générée par le barrage le plus puissant du monde : les Trois-Gorges, en Chine, et plus du tiers de l’électricité produite dans toute l’Afrique. Toutefois, malgré l’emplacement du projet du Grand Inga en RDC, un pays où seuls 10 % de la population a accès à l’électricité, la majorité de l’énergie générée financera les secteurs industriels, de fabrication et urbains d’Afrique du Sud, un pays bien éloigné.
Rudo Sanyanga, directeur du programme International Rivers en Afrique, a récemment visité la RDC et le site du barrage en projet.
« La vallée du Bundu (qui sera inondée afin de créer un réservoir pour les centrales électriques) est en grande partie un paysage naturel entrecoupé de champs cultivés appartenant aux communautés qui vivent aux alentours, » a déclaré Sanyanga à Mongabay.com. « Ces communautés devront être relocalisées. Elles devront faire face à divers impacts sociaux : elles auront besoin de s’adapter à une nouvelle vie si la nouvelle région est différente et il leur faudra apprendre de nouvelles méthodes de subsistance. Les détails des impacts sociaux dépendront du plan de relocalisation et des compensations que ces personnes recevront, le cas échéant. La population générale de la RDC ne profitera pas vraiment du barrage Grand Inga et pourrait se retrouver appauvrie du fait de la dette alourdie par le projet. »
Centrale électrique Inga I. Photo d’International Rivers.
Le coût du projet est estimé à 80 milliards de dollars américains et le financement serait assuré par la Banque Mondiale, la Banque africaine de développement, la Banque européenne d’investissement, l’Agence française de développement et la Banque de développement d’Afrique du Sud.
Le gouvernement de la RDC se prépare à construire la première phase de ce gigantesque projet, le barrage Inga III de 4 800 MW, en octobre 2015. Les consortiums de Chine, Corée et Espagne ont été présélectionnés pour placer une offre sur les contrats de construction.
« La Banque mondiale a annoncé des projets pour accroître son soutien aux grands barrages, particulièrement en Afrique et se sert du projet Inga III comme exemple pour cette approche, » affirme Peter Bosshard, directeur des politiques de relations internationales à International Rivers. « Des projets d’énergie renouvelable décentralisés seraient plus efficaces pour fournir un plus grand accès à l’électricité aux populations pauvres et pour la protection de l’environnement. »
Le barrage Inga III sera situé au niveau des chutes d’eau d’Inga au volume le plus important du monde qui se trouvent 50 km en amont de l’embouchure du fleuve Congo. Les chutes d’Inga sont déjà incorporées dans les installations hydroélectriques Inga I (351 MW) et Inga II (1 424 MW) établies respectivement en 1972 et 1982. La RDC rembourse toujours la dette de ces projets, qui fonctionne à 50 % seulement en raison du manque d’entretien. Inga I et II dévient à l’heure actuelle environ 30 pour cent du débit fluvial ; l’ajout du projet Grand Inga augmentera le débit à deux tiers.
« L’étendue des impacts environnementaux ne sera connue qu’après une évaluation d’impact environnemental, si celle-ci est menée, » ajoute Sanyanga. « En fonction de nos propres évaluations, nous sommes certains que le panache du fleuve Congo sera affecté et que la diversion du débit aura également un impact sur la biodiversité aquatique tout au long des chutes d’Inga. De surcroît, l’inondation de la vallée du Bundu, ainsi que la coupe de la forêt pour le réseau de distribution entraîneront d’énormes pertes en matière de biodiversité terrestre. »
Communauté qui sera déplacée à cause du barrage Grand Inga. Photo d’International Rivers.