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Découverte de cinq nouvelles espèces de chauves-souris au Sénégal

Une équipe internationale de recherche menée par le professeur Petr Koube et Darina Koubinova a découvert cinq nouvelles espèces de chauves-souris vespérales durant une série d’expéditions au Parc National Niokolo-Koba au Sénégal. Ces nouvelles espèces sont considérées comme cryptiques du fait de leur différence de génotype en dépit de similarités physiques. Aucun nom n’a encore été attribué à ces nouvelles chauves-souris.



Ceci fut la première étude génétique conduite au Sénégal sur des chauves-souris et ses résultats ont récemment été publiés dans le magazine scientifique en ligne Frontiers in Zoology. Jusqu’à ce que ces études génétiques aient été entreprises, les scientifiques s’appuyaient sur les caractéristiques physiques et cellulaires des chauves-souris pour faire la distinction entre les différentes espèces. A présent, suite à ces analyses génétiques, plusieurs groupes sont en cours de reclassification.




Nycticeinops schlieffenii – Chauve-souris du crépuscule. Photo gracieusement autorisée par Jaroslav Cerveny.
Nycticeinops schlieffenii – Chauve-souris du crépuscule. Photo gracieusement autorisée par Jaroslav Cerveny.




L’Afrique tropicale est une région sous-échantillonnée. On sait peu de choses sur les espèces de chauves-souris qui y habitent et leurs rapports avec les autres membres de la famille des Vespertilionidés. Avec 48 genres et 407 espèces, les chauves-souris de l’ordre des vespertilionidés, également connues sous le nom de chauves-souris du soir ou « vespérales », sont considérées comme la plus grande famille de l’ordre des chiroptères. Les Chiroptères, plus communément nommées chauves-souris, sont des mammifères dont les membres antérieurs se transforment en ailes, leur permettant des vols prolongés sur de longues distances, contrairement à l’écureuil volant ou opossum ailé qui planent à l’aide d’une membrane supplémentaire reliant leurs membres antérieurs et postérieurs.



Le Parc National Niokolo-Koba où les chauves-souris cryptiques furent découvertes s’étend sur 9,130 km2. Il a été classé comme haut lieu de la biodiversité et figure sur la Liste du patrimoine mondial des sites en péril en raison de la menace d’extinction qui pèse sur la plupart de ses espèces endémiques végétales et animales. Cette menace provient de pressions environnementales telles que la croissance de la population humaine, le braconnage, les feux de brousse et la diminution des ressources en eau, entre autres facteurs.



« Nous ne pouvons répondre car nous ignorons leur nombre » a répondu Koubinova à la question demandant si ces nouvelles chauves-souris étaient menacées. « Généralement, les espèces auxquelles elles sont affiliées ne sont pas menacées, mais nous ignorons l’ampleur de leurs populations au Sénégal. »



L’équipe tchèque mettant en place les filets, assistés par les aides sénégalais. Photo gracieusement autorisée par Prof. Jaroslav Cerveny.
L’équipe tchèque mettant en place les filets, assistés par les aides sénégalais. Photo gracieusement autorisée par Prof. Jaroslav Cerveny.


Certains scientifiques estiment qu’il peut exister environ 50 espèces de chauves-souris vespérales au Sénégal, cependant d’autres considèrent ce chiffre comme une sous-estimation de la réalité. Les scientifiques estiment que l’évolution d’un si grand nombre d’espèces de chauves-souris génétiquement distinctes mais pourtant physiquement semblables dans une même région a été vraisemblablement causée par de longues périodes d’isolement.



« La présence de taxons cryptiques à travers l’arbre généalogique des Vespertilionidés suggère une longue période d’isolement génétique entre les populations d’Afrique de l’Ouest et les autres populations africaines (probablement il y a environ 0.4-6 millions d’années), » rapporte l’étude.



Cette même étude a émis l’hypothèse que la diversification génétique pourrait avoir été causée par le changement climatique dans la région à l’ère du pliocène et du pléistocène, lorsque s’opéra le passage d’un climat relativement aride à un climat beaucoup plus humide à l’abondante végétation, alors que l’isolement génétique s’est produit lorsque l’aridité du climat a provoqué une diminution dramatique de la végétation. Des tendances similaires de diversité et divergence des espèces ont été observées chez d’autres espèces végétales et animales de la région, venant ainsi appuyer cette hypothèse.



Dans cet article, il a été émis l’hypothèse que trois points géographiques fonctionnent comme barrières environnementales, résultant en une diversification ou divergence des espèces. La Fosse de Dahomey, située entre les forêts tropicales de l’Afrique de l’est et de l’ouest, s’est ouverte et refermée par le passé en raison de variations climatiques qui créèrent une barrière de dispersion pour plusieurs espèces vivant dans la forêt. Le Delta du Niger et la bordure volcanique du Cameroun manquent de données permettant de tirer des conclusions sur la manière dont ils affectent les distributions et préférences d’habitat des espèces résidant dans ces régions.



Les chauves-souris représentent 20% des mammifères dans le monde avec plus de 1,200 espèces. Elles existent sur terre depuis l’âge des dinosaures, survivant dans tous les habitats, excepté ceux où il règne un froid extrême. La Kitti à nez de porc pèse moins qu’une pièce d’un centime, faisant d’elle la plus petite chauve-souris de l’espèce. La Roussette fait partie des chauves-souris les plus grosses de l’espèce dont le renard volant à couronne dorée est parmi les plus imposantes. En fonction de leur sous-ordre, méga ou micro chauve-souris, leur régime alimentaire consiste en insectes, fruits, nectar de plantes ou animaux. Les chauves-souris sont également des pollinisatrices, et plusieurs plantes sous les tropiques dépendent exclusivement des chauves-souris pour leur pollinisation.



Nycticeinops schlieffenii – Chauve-souris du crépuscule. Photo par Brock Fenton.
Nycticeinops schlieffenii – Chauve-souris du crépuscule. Photo par Brock Fenton.




Prof. Jaroslav Cerveny, chercheur au sein du projet sénégalais, Institut de Biologie des Vertébrés. Collecte d’une capture. Photo gracieusement autorisée par Prof. Jaroslav Cerveny.
Prof. Jaroslav Cerveny, chercheur au sein du projet sénégalais, Institut de Biologie des Vertébrés. Collecte d’une capture. Photo gracieusement autorisée par Prof. Jaroslav Cerveny.


Neoromicia nana - Photo gracieusement autorisée par Prof. Jaroslav Cerveny.
Neoromicia nana – Photo gracieusement autorisée par Prof. Jaroslav Cerveny.





Citation: Koubinova et al. (2013). Diversité cachée des chauves-souris sénégalaises et découvertes annexes sur la systématique de la famille des Vespertilionidés. Magazine scientifique en ligne Frontiers in Zoology, 10:48
http://www.frontiersin zoology.com/content/10/1/48





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