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Découverte d’un petit carnivore aux airs de peluche dans les forêts de nuages des Andes (photos)

Découverte d’un petit carnivore aux airs de peluche dans les forêts de nuages des Andes (photos)



L’ordre des mammifères carnivores compte une toute nouvelle espèce : l’olinguito. Celui-ci a été photographié à l’état sauvage dans la Tandayapa Bird Lodge, en Équateur. Photo de : Mark Gurney.
L’ordre des mammifères carnivores compte une toute nouvelle espèce : l’olinguito. Celui-ci a été photographié à l’état sauvage dans la Tandayapa Bird Lodge, en Équateur. Photo de : Mark Gurney.


Si l’olinguito ressemble à une peluche sauvage capable de grimper aux arbres et munie d’une queue de chat, il s’agit en fait du plus récent mammifère carnivore découvert dans le monde. Cette découverte remarquable (il s’agit du premier mammifère carnivore découvert dans l’hémisphère occidental depuis les années 1970) a été faite dans les luxuriantes forêts de nuages des Andes, une région riche en biodiversité abritant un grand nombre d’espèces que l’on ne trouve nulle part ailleurs. Baptisé « olinguito » (Bassaricyon neblina), ce nouvel animal appartient à un groupe de mammifères méconnus et difficiles à appréhender, les olingos, apparentés aux ratons laveurs, aux coatis et aux kinkajous. Toutefois, selon la description qu’en fait la revue Zookeys, l’olinguito est le membre le plus distinct de son groupe, séparé des autres olingos par 3 à 4 millions d’années (soit une période supérieure à celle de l’existence de l’Homo sapiens).



« Vous pouvez les différencier en observant presque n’importe laquelle de leurs caractéristiques ! », a expliqué à Mongabay Kristofer Helgen, scientifique à la tête de l’équipe et conservateur en charge de la division des mammifères à la Smithsonian Institution. « Les olinguitos sont plus petits que les olingos et possèdent une fourrure plus longue et plus douce (les poils des olingos sont plus courts et plus rêches) et elle est également plus colorée (en général d’un brun rougeâtre ou orangé chez les olinguitos et tirant sur le brun, brun clair et gris chez les olingos). Ils ont une queue plus courte et plus touffue, des oreilles plus petites et une tête plus arrondie. L’olinguito a de plus grosses molaires et les os de ses oreilles sont plus petits. Son crâne n’a pas exactement la même forme que celui d’un olingo. »



Les olinguitos sont également les seuls de leur famille à vivre dans des forêts de nuages de haute altitude, à une hauteur de 5 000 à 9 000 pieds (1 500 à 2 700 mètres) au-dessus du niveau de la mer.



L’olinguito a failli être découvert plusieurs fois au cours du siècle dernier et a même été exposé dans des zoos, comme celui-ci au Zoo de Louisville. Photo de : I. Poglayen-Neuwall.
L’olinguito a failli être découvert plusieurs fois au cours du siècle dernier et a même été exposé dans des zoos, comme celui-ci au Zoo de Louisville. Photo de : I. Poglayen-Neuwall.

En vérité, les scientifiques n’ignoraient pas complètement l’existence de cet animal, mais ils l’ont confondu pendant plus d’un siècle avec des espèces d’olingos de plaine. L’olinguito a même été exposé dans des zoos américains par le passé, mais a été identifié comme étant un olingo. Sa taille plus petite, sa forme bien particulière et son habitat de haute altitude n’ont simplement pas été reconnus.



Helgen et son équipe de chercheurs ont tout d’abord réalisé qu’il y avait certaines différences marquées entre l’olinguito et ses cousins en étudiant des spécimens dans des musées. Cette découverte a poussé Helgen à tenter de trouver un spécimen vivant à l’état sauvage, s’il en existait toujours. La vidéo d’un olinguito sauvage tournée par le zoologue équatorien Miguel Pinto a constitué une avancée majeure. Peu après, Helgen et Roland Kays du Museum of Natural Sciences de Caroline du Nord se sont mis en route pour l’Équateur.



« La découverte de l’existence de l’olinguito dans les collections d’un musée a été l’un des plus beaux jours de ma vie de scientifique, Helgen explique-t-il. Pouvoir l’observer à l’état sauvage en Équateur a été encore plus fort. J’ai découvert de nombreuses espèces de mammifères jusque-là inconnues, mais celle-ci est la plus passionnante de toutes. » Kays et lui ont passé trois semaines à étudier l’animal en Équateur.



Les scientifiques ont découvert que, comme les olingos de plaine, le petit olinguito est avant tout un animal nocturne qui semble passer la plus grande partie de son temps dans les arbres. À ce jour, on n’a pu voir l’olinguito se nourrir d’autre chose que de fruits. Helgen précise toutefois que cette nouvelle espèce est considérée comme carnivore.



« L’olinguito est le plus petit membre de la famille des ratons laveurs, qui fait elle-même partie de l’ordre mammifère Carnivora. Les membres de cet ordre sont des carnivores », explique-t-il avant d’ajouter que « l’olinguito est carnivore par association, même si on ne l’a pas vu manger autre chose que des fruits pour l’instant. Tous les autres membres de la famille du raton laveur mangent un peu de viande, et c’est quelque chose qu’on devrait pouvoir bientôt observer chez l’olinguito ».



L’article de Helgen publié dans Zookeys décrit non seulement cette nouvelle espèce, mais remet également de l’ordre dans la famille de l’olingo. Après des années de recherche, les scientifiques reconnaissent aujourd’hui l’existence de quatre espèces distinctes d’olingo : l’olinguito, l’olingo commun (Bassaricyon gabbii) que l’on trouve en Amérique centrale, l’olingo d’Allen (Bassaricyon medius) présent en Amazonie à l’est des Andes et le Bassaricyon medius que l’on trouve au Panama et dans la partie occidentale de l’Amérique du Sud. C’est la première fois que des scientifiques parviennent à établir une généalogie concluante des olingos. L’olinguito ne constitue lui-même pas une espèce simple : Helgen et son équipe ont identifié quatre sous-espèces dans les montagnes andines de l’Équateur et de la Colombie.



Illustration de 1902 de l’olingo, dont la queue ressemble à celle d’un chat. Illustration de : Frank E. Beddard.
Illustration de 1902 de l’olingo, dont la queue ressemble à celle d’un chat. Illustration de : Frank E. Beddard.

« Nous avons évalué que [l’olinguito] est au mieux considéré comme “Presque menacé” selon la liste établie par l’UICN, si l’on se base sur les taux de déforestation des forêts de nuages où ils vivent et qui constitue leur principale menace », Helgen a-t-il déclaré. « Réserver le plus de forêts de nuages possible dans des régions bien protégées est le meilleur moyen d’assurer la protection et la préservation de l’olinguito et de nombreuses autres espèces et d’animaux vivant uniquement dans ces mêmes forêts de nuages andines. »



Helgen et son équipe espèrent que cette nouvelle découverte débouchera sur davantage d’efforts de conservation dans les forêts de nuages des Andes, forêts qui sont mises en péril par la déforestation à des fins d’exploitation agricole, forestière et minière. Un article publié l’année dernière dans BMC Ecology a montré que 80 % des foyers de diversité des Andes (au Pérou et en Bolivie) ne sont pas protégés. Les travaux de recherche font également défaut dans les Andes. Un article récent a démontré qu’entre 1995 et 2008, six fois plus de recherches écologiques ont été menées en Amérique centrale que dans les Andes.



Ainsi que l’explique Helgen, « les forêts de nuages des Andes constituent un monde à part, rempli de nombreuses espèces que l’on ne retrouve nulle part ailleurs et qui sont pour la plupart menacées ou en danger. Nous espérons que l’olinguito servira d’espèce ambassadrice pour les forêts de nuages de l’Équateur et de la Colombie et qu’il attirera l’attention du monde sur ces habitats critiques ».





L’olinguito dans les forêts de nuages de l’Équateur. Photo de : Mark Gurney.
L’olinguito dans les forêts de nuages de l’Équateur. Photo de : Mark Gurney.











Couverture de cette nouvelle découverte par Untamed Science.





CITATION: Kristofer M. Helgen, C. Miguel Pinto, Roland Kays, Lauren E.
Helgen, Mirian T. N. Tsuchiya, Aleta Quinn, Don E. Wilson, Jesús E.
Maldonado. Taxonomic revision of the olingos (Bassaricyon), with
description of a new species, the Olinguito
. ZooKeys. 2013.





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