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Selon la Banque mondiale, un réchauffement de 4 degrés Celsius serait désastreux

Hurricane Sandy on October 25th in the Caribbean. Scientists say that climate change may have intensified Hurricane Sandy with its impact worsened by rising sea levels and increased evaporation from hotter marine waters. Recent studies predict that worsening climate change will bring more intense hurricanes. Photo by: NASA.
L’ouragan Sandy le 25 octobre 2012, dans les Caraïbes. Les scientifiques pensent que le changement climatique pourrait avoir intensifié l’ouragan et aggravé son impact à travers l’élévation du niveau des mers et l’accroissement de l’évaporation provenant des eaux marines, dont la température augmente. Des études récentes prévoient en effet que l’aggravation du changement climatique entrainera une intensification des ouragans. Photographie réalisée par la NASA.


Un nouveau rapport publié par la Banque mondiale tire un sombre portrait de la vie sur Terre dans 80 ans : les températures auront globalement augmenté de 4 degrés Celsius, provoquant une montée rapide du niveau des mers ainsi que des périodes de sécheresse dévastatrices. L’agriculture mondiale sera menacée en permanence, les économies auront été ralenties, les villes côtières seront régulièrement inondées, les récifs coralliens se dissoudront à cause de l’acidification des océans, et des espèces s’éteindront à travers le monde entier. D’après la Banque mondiale, c’est la direction que nous prenons même si toutes les nations du monde respectent leurs engagements concernant la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Cependant, le rapport précise également qu’avec des mesures rapides et drastiques, il est encore possible d’empêcher la température globale d’augmenter de plus de 4 degrés Celsius.



« Un monde dans lequel le réchauffement atteindrait 4°C par rapport aux niveaux préindustriels […] serait un monde frappé par des vagues de chaleur sans précédent, de fortes sécheresses et des inondations majeures dans de nombreuses régions, avec pour conséquence de graves impacts sur les systèmes humains, les écosystèmes et les services associés », déclare le rapport, indiquant qu’on assisterait à « une augmentation rapide du risque de mauvais rendements agricoles à mesure que le monde se réchauffe. »



Le rapport, intitulé Turn Down the Heat (« Réduire la chaleur »), déclare qu’aucune région du monde n’échappera aux problèmes causés par le changement climatique, mais que les populations les plus pauvres en seront les premières victimes.



« Un manque d’action face au changement climatique risque de faire du monde dont nos enfants hériteront un monde complètement différent de celui dans lequel nous vivons aujourd’hui », a déclaré Jim Yong Kim, président de la Banque mondiale, en précisant que le réchauffement doit être maintenu en dessous de 2 degrés Celsius. Jim Yong Kim a la particularité d’être le premier scientifique (physicien et anthropologue) à présider la banque. « Le changement climatique est l’un des plus grands défis à relever dans le domaine du développement, et nous devons assumer la responsabilité morale qui consiste à prendre des mesures dans l’intérêt des générations futures, en particulier les plus pauvres. »



Rice fields in Lao PDR. As climate change worsens agriculture will be increasingly hard hit be extreme weather, including drought, heatvwaves, floods, and coastal inundation according to a new report by the World Bank. Photo by: Rhett A. Butler.
Rizières au Laos. Selon un récent rapport de la Banque mondiale, avec l’aggravation du changement climatique, l’agriculture sera de plus en plus touchée par des situations météorologiques extrêmes, telles que des sécheresses, des vagues de chaleur, des crues et des inondations côtières. Photographie réalisée par Rhett A. Butler.

Pour illustrer leur propos, les auteurs du rapport décrivent de manière inquiétante comment des vagues de chaleur sans précédent pourraient se généraliser dans un monde avec 4 degrés de plus.



« Les récentes vagues de chaleur extrême, comme celle observée en Russie en 2010, deviendront probablement la nouvelle norme estivale dans un monde avec 4°C de plus », écrivent les auteurs. « Les régions tropicales d’Amérique du Sud, d’Afrique centrale et les iles tropicales du Pacifique subiront sans doute régulièrement des vagues de chaleur d’une intensité et d’une durée sans précédent. Dans ce nouveau régime climatique à hautes températures, les mois les plus froids seront probablement nettement plus chauds que les mois les plus chauds observés à la fin du 20e siècle. »




De plus, le niveau des mers s’élèvera d’au moins 0,5 à 1 mètre d’ici la fin du siècle, les récifs coralliens et de nombreux autres organismes marins pourraient s’éteindre, et de nombreuses zones agricoles devront peut-être être abandonnées en raison des inondations et de la sécheresse grandissante.



Le rapport prévient également que les efforts d’adaptation pourraient ne pas suffire dans un monde où la surchauffe atteindrait les 4 degrés, les points de basculement climatiques risquant alors d’être dépassés.


« Il n’y a […] aucune certitude qu’une adaptation à un monde avec 4°C de plus soit possible », annonce clairement le rapport.



« Les réponses du système de la Terre au changement climatique semblent être non-linéaires », explique John Schellnhuber, directeur de l’Institut de recherche sur les impacts climatiques de Potsdam (PIK), et co-auteur avec Climate Analytics du rapport commandité par la Banque mondiale. « Si nous nous aventurons bien au-delà de la barrière de sécurité des 2 degrés, en direction de la ligne des 4 degrés, le risque de franchissement des points de basculement augmente brusquement. Le seul moyen d’empêcher cela est de rompre avec la routine habituelle de nos modes de production et de consommation. »


Il reste encore du temps pour éviter le scénario décrit dans le rapport, à condition que les pays s’engagent à « mettre rapidement en place des mesures de coopération internationale », écrivent les auteurs.



La Banque mondiale recommande entre autres de mettre fin aux 1000 milliards de dollars de subventions servant à financer la production de carburants fossiles ; d’établir des prix nationaux du carbone et d’organiser un échange international des droits d’émission ; d’augmenter l’efficacité énergétique et de développer les énergies renouvelables ; et d’inclure les services rendus par les écosystèmes dans l’économie mondiale.



« Le monde doit traiter le problème du changement climatique de manière plus énergique », a ajouté Jim Yong Kim. « Nous avons besoin d’une réponse mondiale à l’échelle du problème climatique, d’une réponse qui nous placera sur une nouvelle voie offrant un développement soucieux du climat et une prospérité partagée. Mais nous n’avons plus beaucoup de temps. »



Cependant, les environnementalistes ont longtemps déclaré que la Banque mondiale, qui fournit des prêts aux pays en développement, faisait partie du problème. Au cours de son histoire, elle a en effet souvent financé de vastes projets liés aux carburants fossiles. Pour répondre en partie à ces critiques, la Banque mondiale a annoncé l’année dernière qu’elle ne financerait désormais plus que des projets d’exploitation de charbon pour les pays les plus pauvres, et seulement après s’être assurée que l’utilisation d’énergies alternatives n’était pas possible. Néanmoins, de nombreux environnementalistes aimeraient voir la Banque mondiale adopter une attitude plus stricte sur la question du changement climatique, et espèrent que Jim Yong Kim mènera la banque dans cette direction.




« La Banque mondiale et les gouvernements membres ont les moyens de financer une transition équitable vers un future plus propre, plus sûr et plus juste. WWF s’attend à ce que ce rapport soit un premier pas vers cette décision », a déclaré Samanta Smith, qui mène l’Initiative mondiale Climat & Énergie du WWF.



Le rapport de la Banque mondiale arrive également tout juste après une autre étude publiée par l’Agence internationale de l’énergie (AIE), qui avertit que les deux tiers des dépôts de carburants fossiles connus devront restés enterrés pour que le monde entier puisse avoir 50 % de chance d’atteindre l’objectif des 2 degrés. Les deux rapports ont été publiés peu de temps avant le prochain Sommet de l’ONU sur le changement climatique, qui débutera à Doha, au Qatar, la semaine prochaine. Malgré des avertissements répétés et des impacts climatiques déja visibles à travers le monde — comme le nouveau record de rétractation de la banquise arctique qui a surpris même les scientifiques les plus pessimistes — rares sont ceux qui s’attendent à une avancée majeure lors du prochain sommet.











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