Nouvelles de l'environnement

Le déclin des abeilles causé par les pesticides dans du sirop de maïs

 Honeybees in an apiary in Germany. Photo by: Björn Appel.
Une ruche d’abeilles en Allemagne. Photo de: Björn Appel.




Des scientifiques de l’Ecole de Santé Publique de Harvard (HSPH Harvard School of Public School) ont recréé le mystérieux Syndrome d’Effondrement Des Colonies d’Abeilles dans plusieurs ruches d’abeilles domestiques en leurs donnant simplement de petites doses d’un pesticide commun, l’Imidacloprid. Depuis 2006 les populations d’abeilles d’Amérique du nord et d’Europe meurent de manière mystérieuse, mais les raisons de ce déclin, connu sous le nom de Syndrome d’Effondrement des Colonies d’Abeilles a jusqu’à présent échappé aux scientifiques. En revanche, suite à deux études publiées la semaine dernière dans Science qui font la relation entre le déclin des abeilles et les pesticides Néonicotinoid qui incluent l’Imidacloprid, la nouvelle recherche renforce l’idée que la raison principale derrière le Syndrome d’Effondrement des colonies d’abeilles ne serait pas les maladies ou les acariens mais des pesticides utilisé communément depuis les années 1990.



Des recherches précédentes ont montré que les pesticides Néonicotinoid qui attaquent le système nerveux central des insectes ne tuent pas les abeilles sur le coup. Cependant afin de tester les effets de ces pesticides, même en quantité minimes, les chercheurs-euses de Harvard traitèrent 16 ruches avec différentes quantités d’Imidacloprid, en laissant 4 ruches non-traitées. Après 12 semaines, les abeilles des 20 ruches – traitées et non traitées – étaient en vie, bien que celles qui furent traitées avec les plus fortes doses d’Imidacloprid avaient l’air plus faibles. Mais après 23 semaines tout avait changé : 15 des 16 ruches (94 pour cent) traitées avec l’Imidacloprid présentaient le Syndrome d’Effondrement des Colonies d’Abeilles : les ruches étaient presque entièrement vides et restaient seulement quelques jeunes abeilles qui avaient survécu. Les adultes avaient simplement disparu. Les ruches qui avaient reçu les doses les plus fortes d’Imidacloprid se sont effondrées en premier. Entre temps les quatre ruches non traitées sont restées en bonne santé.



« Il ne fait aucun doute que les Néonicotinoids ont mis en péril la survie des abeilles domestiques dans l’environnement, » a déclaré à mongabay.com Chensheng (Alex) Lu, auteur principal et professeur associé à l’HSPH. Il est évident que l’Iimidacloprid est très probablement le coupable du Syndrome d’Effondrement des Colonies d’Abeilles et ce à travers un mécanisme unique qui n’a jamais été mentionné avant notre étude. »



Ce mécanisme? Du sirop de maïs haut en fructose. De nombreux-euses apiculteurs-trices ont recours à du sirop de maïs haut en fructose pour nourrir leurs abeilles ce qui, déclarent les chercheur-euses, ne mettait pas en danger les abeilles jusqu’à ce qu’on commence à traiter le maïs aux Etats-Unis avec de l’Imidacloprid en 2004-2005. Un an plus tard apparaissait le premier cas de Syndrome d’Effondrement des Colonies d’Abeilles.



Il n’en faut pas beaucoup pour tuer les abeilles selon Lu qui dit qu’une quantité minime (20 parts pour un milliard) d’Imidacloprid est assez pour entrainer le Syndrome d’Effondrement des Colonies d’Abeilles en 6 mois.



Des preuves irréfutables



La recherche de Lu fait suite à deux autres études qui ont été largement diffusées la semaine dernière et qui font aussi le lien entre le Syndrome d’Effondrement des Colonies d’Abeilles et les pesticides Néonicotinoid.



Une équipe Britannique exposa des bourdons terrestres (Bombus Terrestris) à de petites doses d’Imidacloprid, et les plaça dans un enclos naturel libres de butiner. Après 6 semaines (un temps beaucoup plus court que dans le recherche de Lu), l’équipe pesa les nids et les compara avec les colonies qui n’avaient pas été exposées. Les colonies qu’on avait traitées étaient en moyenne 8 à 12 pour cent plus petite que celles qui n’avaient pas été exposées ce qui signifie que les bourdons traités ne ramenaient pas autant de nourriture. Mais ce qui était encore plus inquiétant c’est qu’il manquait des reines. Les colonies exposées aux pesticides produisaient 85 pour cent de reines en moins: au total seulement 1 à 2 reine par ruche. Les reines sont les abeilles les plus importantes dans une colonie, en effet ce sont elles qui créent de nouvelles colonies après l’hiver quand toutes les autres abeilles sont mortes.



Une deuxième études, cette fois-ci menée en France, montre l’effet direct des pesticides Néonicotinoid sur les abeilles qui entraine éventuellement l’effondrement de la colonie. Des chercheurs-euses attachèrent de minuscules micro puces à des abeilles domestiques en liberté afin de suivre leurs mouvements. Ils/elles leurs administrèrent ensuite un petite dose d’un autre pesticide Néonicotinoid, appelé Thiamethoxam, à un échantillon d’abeilles. Les abeilles exposées avaient 2 à 3 fois plus de chance que les abeilles non exposées de ne pas rentrer de leurs excursions de butinage.



Ce que les chercheurs trouvèrent implique que les pesticides Néonicotinoid déboussolent les abeilles, ainsi au lieu de retourner à la ruche, elles se perdent et meurent. Cela expliquerait pourquoi les ruches touchées par le Syndrome d’Effondrement des Colonies d’Abeilles se retrouvent largement vidées de leurs ouvrières: il semble que le pesticide les rendent incapables de retrouver le chemin de la ruche.



Cela aura pris du temps pour comprendre le lien entre le Syndrome d’Effondrement des Colonies d’Abeilles et les pesticides Néonicotinoids, parce que les scientifiques recherchaient une cause de mort subite plutôt que la raison d’une mort lente sur plusieurs mois, mentionne Lu. Il ajoute que, de plus, les scientifiques ont ignoré « que l’augmentation de l’utilisation des Néonicotinoids dans le temps coïncide avec le déclin des populations d’abeilles. »



« Il faut que les législateurs examinent les effets de doses non mortelles de pesticides tout au long du cycle de vie du modèle testé (dans ce cas, de l’abeille domestique) » déclare Lu. Il remarque de plus que les résultats du test LD50 (c. à. d. une dose mortelle qui entraine la mort de la moitié des spécimens testés) ne sont pas pertinents pour les tests effectués de nos jours quant à la toxicité des produits chimiques. « En d’autres mots il faut que les dirigeants commencent à tester les effets à long termes des produits chimiques sur l’environnement, et pas seulement chercher à savoir s’ils sont susceptibles de provoquer la mort immédiate ou non des sujets concerné.



Les abeilles jouent un rôle vital comme pollinisateurs dans de nombreux écosystèmes. Elles apportent aussi énormément a la société humaine, en terme de production de miel mais aussi, plus important encore, en terme de pollinisation d’une grande variété de fruits, de légumes, de noix et de fleurs. La valeur financière des abeilles rien qu’aux Etats unis a été évaluée a entre 8 et 12 milliards de dollars.






CITATIONS:



Chensheng Lu, Kenneth M. Warchol, Richard A. Callahan. In situ replication of honey bee colony collapse disorder. Bulletin of Insectology. 2012.



M. Henry; O. Rollin; J. Aptel; S. Tchamitchian; M. Beguin; F. Requier; O. Rollin; A. Decourtye. A Common Pesticide Decreases Foraging Success and Survival in Honey Bees. Science. 2012.



P.R. Whitehorn; S. O’Connor; D. Goulson; F.L. Wackers. Neonicotinoid Pesticide Reduces Bumble Bee Colony Growth and Queen Production. Science. 2012.



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