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80% de l’expansion des zones agricoles tropicales entre 1980-2000 s’est faite au dépend des zones forestières

Plus de 80 pour cent de l’expansion des zones agricoles tropicales entre 1980 et 2000 s’est faite au détriment des zones forestières d’après les recherches publiées la semaine dernière dans l’édition en ligne du Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS).



L’étude, basée sur l’analyse des images satellite collectées par les L’organisation des Nations Unies pour la nourriture et l’agriculture ( United Nations Food and Agricultural Organization, FAO) et conduite par Holly Gibbs de l’Université de Stanford, démontre que 55 pour cent des nouvelles terres agricoles se sont développées sur des zones forestières vierges, et que 28 pour cent sur des zones forestières perturbées. Le reste s’étant constitué sur des terrains d’arbustes.



«Ces résultats démontrent que l’expansion agricole ne s’est pas faite sur des terrains déjà nettoyés mais a effectivement bien constituée un facteur majeur de déforestation et d’émission de carbone.» écrivent les auteurs.
«Cette étude confirme que les forêts tropicales étaient les premières sources de nouvelles zones agricoles dans les tropiques durant les décennies 1980 et 1990.»



Les origines des nouvelles zones agricoles, 1980 à 200. Les barres montrent les proportions moyennes de terres sources comprenant les nouvelles terres agricoles dans les principales régions tropicales. Crédit légendes et images: Gibbs et al 2010.

La zone agricole totale a augmenté de 629 millions d’hectares (ha) dans les pays en voie de développement dans les années 89 et 90, incluant une nette augmentation de 100 millions d’hectares dans les régions tropicales. La majorité de l’expansion se localisée au Brésil, en Indonésie et en Malaisie, pays qui aujourd’hui produisent plus de 40 pour cent du sucre de canne mondial, soja, huile de palme, mais ont aussi les plus grandes quantités de forêts perdues.
Cette déforestation a entrainé une libération conséquente de gaz à effet de serre.



«Cela a un impact important sur le réchauffement climatique, si nous continuons ainsi d’étendre nos zones cultivables au détriment des forêts tropicales» déclare Gibbs dans un communiqué.
«Chaque million d’acres de forêt qui est coupé libère la même quantité de carbone dans l’atmosphère que 40 millions de voitures sur une période d’une année.»



Gibbs et ses collègues ont établit que l’expansion de culture était plus rapide dans les années 80 que 90 mais «les pâturages montrent la tendance inverse» avec les augmentations les plus larges en Amérique du Sud. La zone agricole convertie depuis des forêts tropicales vierges d’Amérique Latine était 13 pour cent plus haute dans les années 90 que 80.



«Nous observons des tensions grandissantes entre le développement des cultures alimentaires, pâturages et le carburant et le maintien des forêts,» a expliqué Gibbs à mongabay.com.




Zones de développement des nouveaux terrains agricoles en Amérique tropicale durant les décennies 1980 et 1990.




Zones de développement des nouveaux terrains agricoles en Amérique tropicale durant les décennies 1980 et 1990.




Zones de développement des nouveaux terrains agricoles en Amérique tropicale durant les décennies 1980 et 1990. Ces cartes montrent les différentes proportions de terrains sources sur de larges zones et des sites Landsat individuels, qui sont classés selon l’ampleur de l’expansion agricole. Crédit légendes et images: Gibbs et al 2010.




Sur la durée de l’étude, les scientifiques n’ont pu démontrer que les terrains agricoles récupérés sur des forêts puis abandonnés montraient une régénération de la forêt.



«Nous estimons que moins de 5% des territoires agricoles se sont par la suite re-développés avec une végétation naturelle durant les années 80 et 90,» expliquent les auteurs.



Le rapport prévient aussi que la tendance à empiéter sur la forêt pour gagner de la surface agricole va se poursuivre.



«Si l’expansion agricole constatée entre 1980 et 2000 persiste, nous devons nous attendre à une continuation de la disparition des forêts intactes et détériorées dans les tropiques. Cela afin de satisfaire la demande grandissante de nourriture, fourrage et carburant,» écrivent les auteurs.
«En effet, les dernières études confirment que l’expansion agricole extensive est le facteur principal de déforestation au long de cette période, montrant une diminution des forêts en parallèle à l’explosion du marché de consommation.»



Cependant, les auteurs restent assez optimistes au sujet de l’avenir des forêts tropicales.
Ils soulignent l’urgence de réduire les émissions dues à la déforestation et la dégradation des forêts (REDD), avec une approche qui pourrait offrir des compensations aux pays tropicaux protégeant leurs forêts. Selon certaines propositions, les fermiers et propriétaires de ranchs pourraient recevoir des subventions carbones récompensant l’expansion réfléchie sur des prairies et zones agricoles en jachère au lieu d’empiéter sur les zones forestières.



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«La bonne nouvelle c’est que nous constatons de gros changements au Brésil qui compte pour un quart dans l’expansion agricole tropicale,» nous explique Gibbs dans un email.
«C’est encourageant de voir que les déforestations sont en déclins depuis 2004 alors que la production de soja, sucre de canne et l’élevage de bétail augmentent.»



«Le Brésil a renforcé les mesures établies par les lois environnementales et aussi réduit les accès aux crédits aux déboiseurs connus. Cependant, en jouant sur les pressions que peuvent exercer les consommateurs, le moratoire sur le soja réclamé entre autres par Greenpeace a aussi contribué au développement de partenariats au sein de cette industrie, et à s’assurer que les cultures de soja et plus récemment l’élevage de bétail ne conduisent pas à de nouvelles déforestations.»



«Il est important de se rappeler que malgré tout nous sommes en pleine crise économique globale. La vraie question concerne la capacité du gouvernement brésilien et de son moratoire à protégé ces zones quand les prix s’envoleront à nouveau.»



«La pression continue des groupes activistes combiné aux accords internationaux sur le climat pourrait créer une vraie opportunité à changer le cours des choses en faveur de la conservation des forêts plutôt que de l’expansion agricole.»


Faits régionaux



Afrique :

  • Près de 60% des nouvelles terres agricoles proviennent de forêts intactes, plus 35% issues de forêts détériorées.
  • Entre 1980 et 2000 les zones de pâtures ont augmenté d’environ 50% en Afrique de l’Est et d’à peu près 25% en Afrique de l’Ouest.
    En Afrique Central la zone totale de pâturage a décliné.

Asie:

  • L’Asie du Sud a développé 60% de ces nouvelles terres agricoles sur des forêts intactes et plus de 30% sur des forêts détériorées.
  • La zone de plantation arboricole a augmenté entre 1980 et 2000, passant d’environ 11 millions d’hectares à 17,4 millions d’ha.
  • La culture d’huile de palme est responsable de plus de 80% de cette expansion depuis les années 1990.

Amériques:


  • Les zones de pâture pour le bétail ont augmenté d’environ 35 millions d’hectares en Amérique du Sud et de 7 millions d’hectares en Amérique Centrale entre 1980 et 2000
  • Les zones de pâturages ont augmenté de 5 millions d’hectares en Amérique du Sud entre 1980 et 2000, plus du double de l’augmentation en Amérique Centrale.
  • Le sucre de canne et le soja sont responsable de la majorité des augmentations en Amérique du Sud, alors que peu de changements au niveau des cultures ont eu lieu en Amérique Centrale, dominée par celle du mais.
  • La zone agricole convertie depuis des forêts tropicales vierges était 13% plus importante dans les années 90 que 80.




CITATION: H. K. Gibbs, A. S. Ruesch, F. Achard, M. K. Clayton, P. Holmgren, N. Ramankutty, et J. A. Foley. Les forêts tropicales étaient les sources premières de nouvelles zones agricoles dans les années 1980 et 1990. PNAS www.pnas.org/cgi/doi/10.1073/pnas.0910275107


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