Pour un défenseur de l’environnement, l’idée de comparer la valeur d’une espèce par rapport à une autre tient du blasphème, surtout si cette valeur est mesurée en termes d’impact marketing destiné à sensibiliser les gens au réchauffement climatique.
Au cours des dernières années, l’ours polaire est devenu le symbole médiatique par excellence des effets néfastes du réchauffement de la planète, au point d’ancrer dans de nombreux esprits la notion que cette espèce est au bord de l’extinction. Or on estime à 25000 le nombre d’ours polaires évoluant dans l’Arctique, chiffre auxquels viennent certainement s’ajouter des milliers d’autres spécimens vivant dans des coins plus isolés.
C’est bien plus qu’une autre espèce symbolique, qui souffre pourtant d’un déficit de popularité médiatique (et donc d’attention et d’argent): le lion, dont on estime à 20000 le nombre total d’individus vivant en liberté.
Plus de lions sauvages au Kenya en 2015
Il ne reste aujourd’hui que 2000 lions sauvages sur l’ensemble du territoire, et il en disparaît 100 chaque année. Victimes entres autres du braconnage, de la rarification des ongulés (qui constituent la principale source d’alimentation des lions, et voient leurs cycles migratoires profondément perturbés par le phénomène climatique El Nino) et de la cultivation des fleurs et des fruits destinés à l’export (cultivation qui assèche des rivières et des lacs entiers), les lions voient leur habitat rétrécir et leurs ressources naturelles diminuer. On prévoit qu’en 2015, les seuls spécimens présents au Kenya vivront en captivité. Les plus optimistes prétendent que les réserves animalières de la Tanzanie voisine (3000 lions et plus de 2 millions d’ongulés) aideront les lions du Kénya à préserver leur patrimoine génétique. Ils négligent malheureusement le fait que l’ecosystème du Nord du Serengetti réside au Kenya.
Un écosystème en danger
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La rivière Mara alimente tout le Nord du Serengetti, mais elle a récemment perdu plus de 40% de son eau. Causes principales: le déboisement de la forêt Mau voisine et l’irrigation à outrance des terres de la région à des fins agricoles. Si cette assèchement dépasse les 50%, l’écosystème entier de la rivière s’effondrera. Durant les trois mois que dure la saison sèche chaque année, cette zone constitue pourtant une source d’approvisionnement majeure pour les hordes d’ongulés qui migrent vers la réserve du Masai Mara.
Si l’écosystème lié à la Mara venait à s’effondrer, c’est le Serengetti entier qui en pâtirait: les scientifiques estiment qu’à court terme entre 75 et 90% de la population des ongulés pourrait disparaître. Réduits de la sorte, ces ongulés seraient alors décimés par les quelques 10000 prédateurs (lions, léopards et hyènes) du Serengetti, qui à leur tour disparaitraient faute de gibier. Les lions étant territoriaux, ils seraient les premiers sur la liste.
Un nouveau symbole
Pour que cette situation évolue, les problèmes que rencontre le Serengetti, le Masai Mara et le reste de l’écosystème est-africain doivent considérablement gagner en médiatisation. De la même manière que l’ours est devenu le symbole de l’Arctique, le lion doit devenir un symbole pour la survie de l’environnement africain.
Vous pouvez apporter votre aide en soutenant un groupe comme WildlifeDirect, qui finance directement l’aide à la conservation sur le terrain.
A propos de l’auteur
Uwe Skrzypczak est un photographe animalier. Si la sensibilisation à long terme des problèmes que rencontre la région de la Mara vous intéresse, contactez le: serengeti-wildlife.com
Librement traduit de l’anglais par Thomas Smith